On dit que le monde est un théâtre, mais on le compare rarement à un orchestre. Pourtant, sur la scène du Café de la danse, ils étaient là. Maroc, Grèce, Turquie, France... Tous réunis pour parler d’eux-mêmes et de leurs amis l’Algérie, la Bulgarie ou encore l’Arménie. C'est le projet Orient Occident.
Guitare, violon, contrebasse, percussions, kanun et accordéon, l'orchestre n'est pas classique. Il est même atypique, puisque ses membres semblent si respectueux les uns des autres qu'ils n'ont pas besoin de chef. Un orchestre presque mythologique dans lequel tout le monde partage le même langage tout en gardant ses propres accents.
La diversité du discours est à l'honneur. En duo ou en trio, les instruments s'interpellent, se répondent et jouent sur les notes. Parfois ils s'expriment seuls, se mettant en scène mais jamais en danger. Les autres écoutent, bienveillants. Musique, silence, tout est question d'harmonie.
Ils sont six musiciens à être assis sur scène, en arc de cercle, face au public. Comme un conseil de sages qui s'apprêteraient à converser. Les créateurs d'invisible, ce sont eux. La conférence des instruments commence avec les mains humaines : des doigts qui grattent des cordes pendant que d'autres s'efforcent de défaire le monde. Les musiciens se regardent et se sourient, toujours. Quand l'intensité atteint son point d'orgue, ils laissent couler quelques larmes, tout en souriant et tout en se regardant, toujours. C'est une intériorité qui s'exprime, sans que l'on sache vraiment si elle est collective, individuelle, inventée ou ancestrale.
A deux reprises, la voix vient compléter la palette des instruments. D'abord en arabe, avec une chanson qui reprend un poème algérien. Puis en français, avec une composition de la violoniste. Mais finalement, qu'importe de comprendre ou non les paroles : la poésie de l'instant présent n'a pas besoin d'explication de texte pour se faufiler entre les spectateurs. Avec ou sans mots, le partage si essentiel est absolu.
Dans la salle, on est à la fois concentré et complètement ailleurs. L'un des titres du groupe s'appelle Arrows. On est bien pris par un émoi qui transperce, profondément. Ce n'est pas l'oeuvre de Cupidon, plutôt celle d'Apollon. Ça coupe un peu le souffle mais ça fait terriblement du bien. Cela rappelle à quelle point la musique permet de se retrouver face à soi-même, tout en faisant partie d'un vaste ensemble : le monde.
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